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Comment je suis devenu entrepreneur

L’histoire entrepreneuriale de Serge Beauchemin commence officiellement en 1987. Il vient tout juste de quitter son emploi de vendeur chez un distributeur de matériel informatique en claquant la porte. L’ego gonflé, il se dit que s’il peut vendre pour quelqu’un d’autre, il peut très bien le faire pour lui-même.

Il lance alors l’idée à son meilleur ami, André Morissette, de vendre des logiciels. À l’époque, la plupart des distributeurs se concentrent sur la vente de matériel informatique et d’ordinateurs. Pour les logiciels, c’était un peu le Far West : « Tout le monde les copiait, alors ça ne se vendait pas vraiment », se rappelle-t-il.

Le timing était parfait pour partir en affaires. J’avais 22 ans, rien à perdre et tout à gagner. Pas de blonde, pas de femme, pas d’enfant. Let’s go!

Lorsque les gouvernements ont commencé à légiférer pour enrayer le piratage et à sévir contre les contrevenants, Serge a vite flairé la bonne affaire : « Tous les organismes publics et parapublics – Loto-Québec, Hydro-Québec, la SAQ, les hôpitaux, les écoles –, ça fait beaucoup de monde qui va avoir besoin de logiciels légaux. » Et c’est ainsi qu’est née 3-SOFT, une entreprise spécialisée dans la vente et la distribution de logiciels informatiques.

On connaît déjà la suite : les deux partenaires lancent leur entreprise avec 40 $ en poche : 20 $ pour ouvrir un compte de banque et 20 $ pour enregistrer l’entreprise. Quinze ans plus tard, elle compte plus de 150 employés et son chiffre d’affaires atteint 75 millions $.

Victimes de leur succès

Dès le départ, les deux associés ont l’ambition de faire les choses autrement. « Quand tu es jeune, tu es un peu rebelle, tu ne veux pas suivre le système, dit-il en riant. Tu es en protestation contre tout ce qui se fait autour. On n’échappait pas à cette règle-là. » 

Leur vision : une entreprise où on ne traite pas les employés comme des numéros, où on a du plaisir et où on ne se prend pas trop au sérieux. Mais ils avaient encore bien du pain sur la planche avant d’y arriver.

« On a travaillé pendant des mois à créer un premier bottin de tous les logiciels en français en vente au Québec », se rappelle-t-il. Puis, armés de ce répertoire imprimé au laser sur des feuilles 11 x 17 et agrafé, ils ont fait le tour des ministères et des grandes entreprises du Québec.

Les deux entrepreneurs avaient vu juste : les commandes commencent rapidement à affluer. Bientôt, la jeune entreprise fait face à un défi inattendu : « On s’est ramassés avec des problèmes de liquidités après trois mois d’opérations », raconte Serge Beauchemin. « J’ai une commande de 10 000 $, mais je n’ai pas d’argent pour payer le fournisseur. »

Les cartes de crédit sont pleines, les paiements des autres clients ne sont pas encore rentrés. Je n’ai plus un sou pour acheter la prochaine commande que je viens de faire pour un client.

Il se tourne alors vers son oncle Jack, entrepreneur dans le domaine du meuble, pour lui demander conseil. « Le financement, vous devriez le trouver auprès de vos fournisseurs », suggère ce dernier. 

Suivant ces sages paroles, Serge et André font la ronde de leurs fournisseurs, qui mordent à l’hameçon. « Au bout de cinq ou six mois, on avait 250 000 $ de marges de crédit auprès de nos fournisseurs. C’est là que les affaires se sont mises à décoller. »

À la fin de leur première année, les revenus de 3-SOFT atteignent 600 000 $, puis 1,5 million $ l’année suivante. Un énorme succès pour les deux jeunes hommes de 23 et 24 ans.

Pour nous, c’était la consécration ultime : on était des entrepreneurs. On savait comment faire de la business, on était capables de relever des défis, capables de trouver du financement, d’embaucher du monde. Le monde nous appartenait.

Assurer l’avenir de la compagnie

Au départ, comme pour bien des entrepreneurs qui se lancent en affaires, l’assurance est loin d’être une priorité pour les deux associés, qui se concentrent sur la croissance de l’entreprise et sur l’embauche de nouveaux talents. « Pour nous, l’assurance, c’était se protéger contre le vol, explique Serge. On n’avait rien à voler. On ne gardait rien en stock et on avait chacun un ordinateur qui ne coûtait pas très cher. Si on se les faisait voler, big deal, on en rachèterait d’autres. »

Au tout début, quand tu n’as pas un rond, tu prends plus de risques. Les assurances, c’est bien la dernière chose à laquelle tu penses.

Mais cette insouciance fut de courte durée. « Dès la deuxième année, on s’est rendu compte que si on se faisait voler nos ordinateurs, on perdait aussi nos données, poursuit-il. Si on passait au feu, on perdait toute notre business. C’est devenu un impératif important assez rapidement de contracter des assurances, ne serait-ce que pour protéger l’équipement. »

À mesure que l’entreprise grandissait et que de nouveaux employés étaient embauchés, il est devenu nécessaire d’étendre la couverture à la responsabilité professionnelle. « Dès qu’on a commencé à faire du service informatique, nos avocats nous ont fortement suggéré de mettre en place des polices d’assurance erreur et omission. »

Un nouveau chapitre

En 17 ans, 3-SOFT est devenue l’une des entreprises les plus importantes de l’industrie au Canada. Toute bonne chose ayant une fin, Serge Beauchemin et André Morissette décident de vendre l’entreprise en 2004, alors qu’ils sont au faîte de leur gloire.

« Ça avait été un bon timing de lancer l’entreprise en 1987; c’était maintenant un bon timing pour nous de vendre en 2004 », résume Serge.

Je ne voulais pas nécessairement continuer à travailler 70 heures par semaine pour les 30 prochaines années. J’étais partagé entre le désir de profiter de la vie et celui de continuer à créer de l’abondance, à faire une différence.

La crainte de perdre sa passion pousse bien vite Serge à se lancer dans de nouveaux projets. Pas question pour lui de se reposer sur ses lauriers. Il investit dans plusieurs entreprises et devient un mentor pour plusieurs jeunes entrepreneurs. « J’ai investi dans un petit projet qui m’avait été présenté par des jeunes que j’ai rencontrés lors d’une conférence, raconte-t-il. Deux jeunes qui rêvaient de partir un spa à l’île des Sœurs. » Ce « petit projet », c’était le Strøm Spa Nordique, qui emploie aujourd’hui 850 personnes dans quatre établissements à travers le Québec.

Puis, en 2013, Serge se joint à l’émission Dans l’œil du dragon. Et comme le veut l’expression, le reste appartient à l’histoire.

Aujourd’hui, Serge Beauchemin se consacre à un nouveau rêve d’entrepreneur : former la relève de l’entrepreneuriat québécois avec sa nouvelle entreprise, alias entrepreneur•e.

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